Réalisation : James Wan
Avec : Patrick Wilson, Rose Byrne, Ty Simpkins
La trame est connue : une famille bien sous
tous rapports, aménage dans une nouvelle demeure. Las, celle-ci est percluse de
phénomènes paranormaux, aussi en lieu et place des jours heureux, les Lambert
vont passer à la moulinette de la terreur domestique version
Amityville. Vu, déjà vu, archi vu, le modèle, visiblement exempt de
copyright, vient de titiller à nouveau la tirelire du cinéma mondial avec
Paranormal Activity, autant dire que dans les tuyaux du tout Hollywood
traînent des dizaines de scripts de maisons hantées dont l’aspiration première
est évidement l’espoir d’un retour juteux sur investissement…
Toutefois, le projet était ici initié par James
Wan, dont on ne peut nier la déférence au genre, prouvée non pas avec le succès
galactique de Saw, mais bien avec le sympathique et scolaire Dead
Silence, et l’incroyable Death Sentence, deux bobines fleurant bon
le cinéma à la papa, dans lesquels Wan démontrait des qualités de réalisation
plutôt au dessus de la moyenne. Bref, la sortie d’Insidious, avec sa
réputation de film de trouille et son pédigrée racé, se faisait désirer. Et
comme une bonne nouvelle n‘arrive jamais seule, il s’avère être tout ce qui a
été dit et écrit partout, en mieux même...
Le film évoque une histoire de maison hantée
qui dérape en son cœur pour s’aventurer dans des contrées fantastiques plus
démonstratives, et finir dans un délire de galerie de monstres assez
jubilatoire. Wan reprend tous les poncifs du genre avec le sérieux d’un premier
de la classe. L’image est particulièrement léchée, et les effets sonores et
optiques s’enchaînent dans un crescendo implacable. L’affaire, rondement menée,
et d’ailleurs exécutée par un casting parfait, aidé par des dialogues moins
creux que d’habitude. Wan en profite pour régurgiter avec un certain talent
toutes ses références, nourrissant son script de sa cinéphilie pour donner à
l’ensemble une touche plus intime.
En cela, il serait à rapprocher de cette
génération de bidouilleurs de génie qui s’amusent à faire revivre leur cinéma
d’adolescent dans des films de genre à voir comme des revivals inspirés. Mais à
la différence d’un Rodriguez bordélique que rend génial son caractère free
lance, James Wan est un élève discipliné, pas du tout le genre à traîner au fond
de la classe, près du radiateur, mais plutôt à offrir son goûter à sa maitresse
dans l’espoir de récolter un bon point. Sa personnalité faisant la qualité
première de sa réalisation, ainsi que son principal défaut : un classicisme
formel hors du temps et appliqué. Loin des gesticulations de caméra inutiles, il
calibre chaque mouvement, lui donne un sens, une fonction, rien n’étant laissé
au hasard dans ce film plein comme un œuf. Mieux même, Insidious avance
presque scientifiquement, selon des recettes maîtrisées, et fonctionne à la
perfection.
Grincement, claquement de porte, déplacement
d’objets, râles et murmures, Insidious recycle tout, avant de déraper à
la grâce d’une séance de spiritisme de dingue, avec masque à gaz, projection
astrale, univers superposés et chasseurs de fantômes. Les éléments s’emboîtent
sur le fil malgré le risque d’embardée dû à une succession de scènes incroyables
qui manquent parfois de liant. Mais Wan réussit son tour de force, et nous fait
sursauter sans pour autant en oublier de raconter son histoire. Old school, mais
parfaitement de son temps, Insidious prouve que si James Wan n’est pas
un cinéaste majeur, il se place comme l’un des plus grands héritiers du cinéma
de genre 80’s, de ceux qui arrivent à faire low-cost de véritables bombes qui
donnent l’impression d’avoir couté dix fois plus cher, quand de grosses machines
tentent vainement de se donner des airs de série B avec leurs budgets
pharaoniques. Assurément l’un des meilleurs faiseurs de sa génération.
En bref : Insidious
régurgite avec un certain talent toutes ses influences, d’Amityville à
Poltergeist, en passant par le cinéma plus exigeant visuellement de
Kubrick ou Shyamalan. De la sobriété au grand guignol, tout y est parfaitement
maitrisé, et si l’histoire sent le renfermé, le script s'avère assez osé pour
rendre ce recyclage stimulant. Passionné, James Wan en profite pour remettre à
jour un scénar éculé qu’on ne croyait plus capable de foutre la trouille, et
trousse une série B de première bourre, malgré son caractère parfois un peu trop
scolaire. Une tuerie.
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