mardi 21 février 2012

Vidéo-club : Insidious


Réalisation : James Wan

Avec : Patrick Wilson, Rose Byrne, Ty Simpkins



La trame est connue : une famille bien sous tous rapports, aménage dans une nouvelle demeure. Las, celle-ci est percluse de phénomènes paranormaux, aussi en lieu et place des jours heureux, les Lambert vont passer à la moulinette de la terreur domestique version Amityville. Vu, déjà vu, archi vu, le modèle, visiblement exempt de copyright, vient de titiller à nouveau la tirelire du cinéma mondial avec Paranormal Activity, autant dire que dans les tuyaux du tout Hollywood traînent des dizaines de scripts de maisons hantées dont l’aspiration première est évidement l’espoir d’un retour juteux sur investissement…

Toutefois, le projet était ici initié par James Wan, dont on ne peut nier la déférence au genre, prouvée non pas avec le succès galactique de Saw, mais bien avec le sympathique et scolaire Dead Silence, et l’incroyable Death Sentence, deux bobines fleurant bon le cinéma à la papa, dans lesquels Wan démontrait des qualités de réalisation plutôt au dessus de la moyenne. Bref, la sortie d’Insidious, avec sa réputation de film de trouille et son pédigrée racé, se faisait désirer. Et comme une bonne nouvelle n‘arrive jamais seule, il s’avère être tout ce qui a été dit et écrit partout, en mieux même...

Le film évoque une histoire de maison hantée qui dérape en son cœur pour s’aventurer dans des contrées fantastiques plus démonstratives, et finir dans un délire de galerie de monstres assez jubilatoire. Wan reprend tous les poncifs du genre avec le sérieux d’un premier de la classe. L’image est particulièrement léchée, et les effets sonores et optiques s’enchaînent dans un crescendo implacable. L’affaire, rondement menée, et d’ailleurs exécutée par un casting parfait, aidé par des dialogues moins creux que d’habitude. Wan en profite pour régurgiter avec un certain talent toutes ses références, nourrissant son script de sa cinéphilie pour donner à l’ensemble une touche plus intime.

En cela, il serait à rapprocher de cette génération de bidouilleurs de génie qui s’amusent à faire revivre leur cinéma d’adolescent dans des films de genre à voir comme des revivals inspirés. Mais à la différence d’un Rodriguez bordélique que rend génial son caractère free lance, James Wan est un élève discipliné, pas du tout le genre à traîner au fond de la classe, près du radiateur, mais plutôt à offrir son goûter à sa maitresse dans l’espoir de récolter un bon point. Sa personnalité faisant la qualité première de sa réalisation, ainsi que son principal défaut : un classicisme formel hors du temps et appliqué. Loin des gesticulations de caméra inutiles, il calibre chaque mouvement, lui donne un sens, une fonction, rien n’étant laissé au hasard dans ce film plein comme un œuf. Mieux même, Insidious avance presque scientifiquement, selon des recettes maîtrisées, et fonctionne à la perfection.

Grincement, claquement de porte, déplacement d’objets, râles et murmures, Insidious recycle tout, avant de déraper à la grâce d’une séance de spiritisme de dingue, avec masque à gaz, projection astrale, univers superposés et chasseurs de fantômes. Les éléments s’emboîtent sur le fil malgré le risque d’embardée dû à une succession de scènes incroyables qui manquent parfois de liant. Mais Wan réussit son tour de force, et nous fait sursauter sans pour autant en oublier de raconter son histoire. Old school, mais parfaitement de son temps, Insidious prouve que si James Wan n’est pas un cinéaste majeur, il se place comme l’un des plus grands héritiers du cinéma de genre 80’s, de ceux qui arrivent à faire low-cost de véritables bombes qui donnent l’impression d’avoir couté dix fois plus cher, quand de grosses machines tentent vainement de se donner des airs de série B avec leurs budgets pharaoniques. Assurément l’un des meilleurs faiseurs de sa génération.

En bref : Insidious régurgite avec un certain talent toutes ses influences, d’Amityville à Poltergeist, en passant par le cinéma plus exigeant visuellement de Kubrick ou Shyamalan. De la sobriété au grand guignol, tout y est parfaitement maitrisé, et si l’histoire sent le renfermé, le script s'avère assez osé pour rendre ce recyclage stimulant. Passionné, James Wan en profite pour remettre à jour un scénar éculé qu’on ne croyait plus capable de foutre la trouille, et trousse une série B de première bourre, malgré son caractère parfois un peu trop scolaire. Une tuerie.


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