vendredi 17 février 2012

Ciné express : El Chino



 Réalisation : Sébastian Borensztein

 Avec : Ricardo Darin, Ignacio Huang, Muriel Santa Ana

 Année : 2012

 Durée : 1h 40 ; Pays : Espagne/Argentine

El Chino, c’est le genre de film qui sent le pâté à des kilomètres. Une histoire bourrée de bons sentiments, celle d’un quincailler misanthrope et acariâtre qui recueille malgré lui un chinois en grosse difficulté. Le communiqué de presse fait d’ailleurs froid dans le dos : « C’est l’histoire insolite d’un Argentin et d’un Chinois unis par une vache tombée du ciel ! ». Immédiatement on imagine le topo: réalisation anonyme, gags éculés, ficelles scénaristiques grosses comme des gazoducs trans-sahariens, émotion facile et coulure de mièvrerie garanties producteur, jusque dans les chaussettes. Bref, le film que Frank Zito évite traditionnellement comme la peste.

Et pourtant il y est allé. Plus étonnant, il en est sorti sans la nausée tant attendue. Sûr, le film n’est pas brillant. Tous les poncifs prévus sont là. Le déroulement d’El Chino est aussi nul et prévisible qu’on le craignait. Pire même, il s’enorgueillit de CGI d’une laideur invraisemblable, depuis la fameuse vache tombée du ciel qui rappelle les effets spéciaux à la Jacquouille, jusqu’au décollage d’un avion de transport si toc qu’on croirait une cinématique de jeu vidéo discount. Une bouillasse visuelle qui fait tellement Tiers-Monde qu’on est incapable d’en comprendre la présence sur des écrans du XXIème siècle.

Oui mais voilà, il y a Ricardo Darin aux manettes, avec son bagage d’acteur incroyable et sa justesse hypnotisante. A la limite, du film, on peut ne rien en avoir à faire tant sa performance se suffit à elle-même. Jamais dans le mauvais tempo, malgré toutes les lourdeurs du scénario et de la réalisation, il donne à chaque plan une valeur insoupçonnée, esquissant ici un rictus, là appuyant son regard sur une situation, infimes impulsions qui battent la mesure de la pellicule. Tout en intériorité et en épaisseur, il aimante tout sur son passage, et surtout relève le niveau de ce qui semblait voué à un échec embarrassant. A son contact, le casting tête à claque s’illumine, essaye de se mettre au niveau, gravite autour de la bête de scène avec humilité pour se sauver du ridicule. Et ça marche. A lui seul, Ricardo Darin sauve donc El Chino du naufrage comme De Funes à ses plus belles heures. Peut-être le meilleur acteur en activité. Un monstre.



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