lundi 9 avril 2012

Video-club : The last winter


Réalisation : Larry Fessenden

Avec : James Le Gros, Ron Perlman, Connie Britton

Année : 2006
 
Plutôt que se ruer vers le remake/préquelle/quenelle de The Thing, dont on se fout comme de notre dernière chemise, nous avons préféré nous tourner vers The Last Winter, bobine réputée efficace, dans laquelle on suit une équipe de scientifiques isolée en Alaska basculer dans l’étrange, aux prises d’une force indicible. Sûr, toute ressemblance avec The thing est évidement fortuite, pourtant cela incommode moins que le remake fadasse, cet objet commercial chargé de siphonner les spectateurs sur la base d’un name dropping ridicule, et qui finit le plus souvent par donner un produit qui dévalue définitivement l’original.

Entre la référence et le remake gluant type The fog ou Freddy, il restera toujours un pas, qu’on pourrait qualifier de créatif, et c’est-ce pas qui rend ici le projet de Larry Fessenden séduisant. Car si The last Winter avait été un simple remake, on se serait coltiné les mêmes personnages suivre les mêmes dédales d’une histoire connue, dans une sorte de jeux des sept erreurs où le seul perdant est toujours le spectateur qui passe son temps à regretter l’original. Alors que Larry Fessenden, s’il marche dans les pas de Big John, profite de la correspondance entre son The Last Winter et The Thing pour jouer d’un décalage presque poétique qui n’handicape jamais le métrage. L’équipe est la même à quelques détails près, le décor semblable au point de paraître identique, mais l’histoire dérive, vogue de ses propres ailes, se démarque nettement de l’agressivité primale de La Chose pour finir elle aussi par sonder au plus profond, les failles de l’être humain.

La tonalité du film, désespérée, lancinante, presque douloureuse, dit à chaque plan que quelque chose dans notre monde est pourri. Que personne ne sortira indemne de cette zone d’exploitation pétrolière qui sert de métaphore vibrante à la folie meurtrière dans laquelle l’homme s’est engagé.

Intelligemment, Fessenden se laisse le temps, n’excite pas artificiellement son métrage, joue à fond de l’unité de lieu, de l’isolement, de la claustrophobie ambiante. Sourde, l’hostilité de la région et du climat, imprègne patiemment la pellicule, s’impose aux hommes comme aux baraquements qui semblent de bien pâles remparts face à cette étendue neigeuse infinie vue comme une énergie primitive. De cette ligne de force visuelle, le réalisateur tire une allégorie écologique aussi vibrante que rudimentaire, à l’efficacité redoutable. Empêtrés dans les contradictions humaines les plus contemporaines, qui voient la nature opposée à la finance dans un bras de fer désuet, les personnages ne sont que des marionnettes qui s’ébrouent dans une histoire qui les dépasse, une histoire ancestrale qui fut leur berceau et sera leur tombe. Inexorablement, la nature reprend ses droits, balaye le campement comme le loup la maison des trois petits cochons, refuse aux hommes toute rédemption. Reprend tout simplement ses droits.

En bref : Son minimalisme magique, ses acteurs au cordeau (dont un Ron Pearlman en roue libre bien plus pathétique et crédible que dans le rôle grotesque du patriarche de Sons of Anarchy) sa musique planante et sa mise en images somptueuse sont parfaitement adaptés à son propos simpliste mais pas simplet, The Last Winter sort du lot commun et nous fascine même grâce à une réalisation élégante et inspirée, un discours offensif et une poésie brutale. Du lourd en apesanteur à découvrir d’urgence.

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