Le hasard, si tant est qu’il existe, a fait se croiser sous le regard étourdi de Frank une série, Borgen, diffusée actuellement sur Arte, et un film, L’exercice de l’état, jadis megauploadé, aujourd’hui putlocké, mais qui aurait vraiment mérité un grand écran. Deux faces d’une même pièce : une virée dans les coulisses du pouvoir à une époque charnière dans l’ère politique, celle de la puissance médiatique toujours plus forte, et de l’impuissance des États au regard d’une mondialisation qui en a rogné les prérogatives.
Dans les coulisses : un panier de crabes
Bref, les deux sont la démonstration attendue d’un pouvoir machiavélique -chaque épisode de Borgen s’ouvre sur une citation du philosophe-, même si le film de Pierre Sholler remporte haut la main la palme du réalisme, avec son Olivier Gourmet en mode ministre outsider type Eric Worth pré-Bettencourt. Il impressionne de naturel, délivrant une performance sur la lutte intérieure entre son égo démesuré, ses coups bas que l’on se donne sans même s’en rendre compte, ses fausses fidélités et ses vraies vanités. L’exercice du pouvoir le mâche, le malaxe et l’avale comme cet alligator qu’il voit en songe. La peau se durcit, l’orgueil s’éteint devant les promesses d’avancements. Avec une question à la clef : devient-on surhomme ou sous-homme à ce régime là ?
En bref : Témoignage d’un temps où tout le monde semble avoir abdiqué devant les puissances conjuguées de l’image et de la finance, Borgen et L’Exercice de l’Etat démontent avec intelligence, les mécanismes qui emmènent la classe politique à devenir ce qu’elle est : une affreuse baudruche impuissante dont chaque mot semble être lu sur un prompteur absurde dont on ne sait plus très bien qui l‘alimente. Dès lors, seule la carrière personnelle prend tout son sens. Et la démocratie dans tout cela vous direz vous ? Il parait encore, à l’heure où j’écris ces lignes, qu’il s’agit du moins mauvais système politique que nous ayons à notre disposition… Une double séance glaçante.
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