vendredi 8 mars 2013

CARPENTER / ARGENTO : Les maîtres de l'horreur

           

Réalisation : John Carpenter, Dario Argento

Avec : Meat Loaf, John Saxon, Ron Perlman

Année : 2006

Double programme pour cette chronique, avec deux épisodes de la seconde saison des Master Of Horror de Mick Garris. Une fois encore, le producteur a convié à son anthologie le gratin de l’histoire de l’épouvante, parfois bien has-been, pour un tour de piste plutôt saignant. Le premier, J’aurai leur peau de Dario Argento, est une histoire de fourreur, de peaux de ratons laveurs et de malédiction, quand le second, Piégé à l’intérieur de John Carpenter, nous fait assister à l’assaut d’une clinique spécialisée dans les avortements par des intégristes pro-life plutôt bas de plafond…

Les papys de l'horreur en ont encore sous la semelle
Notons d’abord que les deux épisodes sont particulièrement jusqu‘au-boutistes, ce qui est assez étonnant pour une production télévisuelle, et prouve la sincérité du projet. L’occasion donnée pour nos papys de l’horreur de prouver qu’ils en ont encore sous la semelle. Et pour ce faire, les moyens semblent abondants, les effets spéciaux étant particulièrement soignés, ainsi que la qualité de l’acting, avec de la star old school en veux-tu en voilà, à l’image de John Saxon, qui retrouve Argento avec qui il a joué dans Ténèbres, et qui cabotine à mort dans le rôle d’un braconnier redneck. On retrouvera également avec plaisir le hard rockeur reconverti Met Loaf dans le rôle d’un fourreur qui ambitionne d’emballer une stripteaseuse avec son manteau magique et le toujours médiocre Ron Perlman, dans une variante de son personnage de patriarche de Son’s of anarchy, qui profite de l’étroitesse réelle de son front pour apporter toute sa crédibilité à un fanatique religieux.

Les deux histoires sont plutôt agréables à suivre, leurs scénarios respectifs bien tenus, gorgés d’autoréférences, comme cet enfant démoniaque qui rappelle furieusement la tête mécanique de The thing ou cette attaque type western d’une institution en plein jour par une horde, avec ses gunfights si chers à Carpenter. Très gores, surtout l’Argento, les glorieux anciens en profitent pour shooter quelques scènes bien craspecs, comme ce coup de boule donné à un piège à loup, ou cet avortement opéré sur un homme. Bref, on retrouve comme convenu les éléments politiques subversifs chez Big John, et le délire visuel chez le maestro, la ritournelle d’inspiration Morricone chez l’un, la rythmique minimaliste chez l’autre, tout étant bien là où il faut, comme il faut.

Des vieilles gloires mal en point

Mais alors pourquoi ce malaise ? Cette impression que les deux maîtres, qui ont tant apporté à l’histoire du cinéma de genre, s’adonnent à une certaine forme de modernité forcée qui ne leur correspond pas si bien que cela ? Pourquoi cette impression qu’au lieu de leur remettre le pied à l’étrier, cette expérience scelle définitivement leur sort ? Peut-être parce que réaliser de leur vivant les épisodes d’une anthologie à leur gloire est une grossière faute de goût. Leur performance, marketée comme un évènement à part entière, est par la même scrutée, détaillée comme le fait d’un créateur alors qu’il s’agit de l’incarnation même du film de commande, d’une pige de classe assez désincarnée qui n’apporte rien à leurs auteurs respectifs, si ce n’est d’en être. Ensuite parce que s’abaisser à attraper la main tendue, et certainement sincère, de Mick Garris, montre à quel point les vieilles gloires sont mal en point, lâchées par l’industrie du cinéma, tellement isolées que l’occasion d’un épisode télé ne se refuse plus. Ce qui explique que dans un excès d’égoïsme mal contrôlé, on se prenne à penser que, finalement, on aurait préféré voir les oiseaux se cacher pour mourir…

En bref : Incapable de trancher entre le plaisir de voir John Carpenter et Dario Argento imprimer leurs regards sur de la pellicule fraîche, et la déception évidente de projets qui auraient finalement pu être portés par d’autres sans qu’il n’y ait grande différence, on peut quand même se féliciter de l’humilité de ces géants qui viennent crédibiliser un projet qui n’aurait eu aucun sens sans eux, et n’en a peut-être pas beaucoup avec… Restent deux petits épisodes plutôt bien foutus, assez méchants, qui nous en donnent pour notre argent, si tant est que le cœur de l’affaire se trouve dans le porte monnaie.





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