Justine + Santa cruz + Wank for a peace (guerilla -poubelle- asso)
Paris, Les Combustibles, la nuit vient de tomber. Frank et Madame Zito mangent seuls dans le restaurant branchouille de l’étage, absolument hors des prix du public des lascars du soir. Fauchés comme les blés, quelques mômes se partagent timidement une bière. L’occasion donnée de voir arriver en ordre dispersé les musiciens du soir. Au terme d’une tournée éclair d’une dizaine de dates, on sent les trois groupes soudés comme des Gaulois au banquet final. De bonnes têtes de pas vainqueurs, mais qui résisteront envers et contre tout, contre la marche en avant de notre monde à la gomme. Des héros comme on espérait les trouver. Bonne franquette, ambiance colo, seul Alex, le chanteur de Justin(e) semble un peu à côté de ses moufles. La gueule dans le cul. Dévitalisé. Comme éteint. Direct il file aux chiottes. Revient. Y retourne. Tous les quarts d’heure. Comme aimanté. Madame Zito est formelle : il doit avoir une chiasse carabinée. Frank acquiesce, dubitatif, se dit que si l’occasion se présente, il ne lui serrera peut-être pas la main, en suivant discrètement du regard Fab, le bassiste crêté, qui profite du départ de ses comparses pour finir les verres. Les augures seraient d’accord : la soirée semble bien partie.
Et c’est peu d’écrire la bonne surprise. D’abord avec Santa Cruz , groupe de punk
énergique qui déploie un hardcore offensif de très bon goût, avec ses compos
tendues et efficaces ultra référencées. Courtes, elles vont à l’essentiel, comme
cet hommage à Troma, Surf nazi must die ou Pizza punk. Belle ambiance de départ,
le set passe trop vitre, il commence déjà à faire chaud. La suite ne casse pas
l’ambiance, loin de là. Wank for
Peace, avec son hardcore plus structuré et mélodieux, mais aussi un peu
moins intéressant. Pourtant la température se fait équatoriale. Le chanteur
donne tout ce qu’il peut, l’ambiance déchire tout, les refrains sont scandés par
un public acquis, jusqu’aux pogos, amusants au départ, qui finissent par se
montrer plus agressifs. Les choses sérieuses auront donc commencé sans que l’on
s’en rendent vraiment compte, et c’est dans le bordel des grands soirs qu’ils
clôturent une prestation qui sera montée graduellement en puissance pour finir
très fort. Deux groupes à suivre, à l’évidence.
Durant ce temps, on aura pu admirer la solidarité des amis de Justin(e) venu
foutre le bordel avec le public, chauffeurs de salles goguenards et auteurs de
bœufs multiples qui finissent de détendre l’atmosphère. Atmosphère qui vire
cocotte minute dès les premiers accords lancés par le groupe nantais. Ouverture
brute de décoffrage avec Accident n°7. Alex revenu des chiottes semble s’être
ressaisi. Il crache avec conviction à la face d’un public bouillant une rafale
de titres plus efficaces les uns que les autres. Fini la chiasse bonjour la
classe. Autour de lui, Olive à la guitare, Fab à la basse et Fikce à la batterie
se démènent, éructent les chœurs enthousiasmants des compos de Justin(e) repris
comme un seul homme par des Combustibles qui transgouttent à grosses spires.
Plus rock et moins hardcore que leurs prédécesseurs, ils cloutent leurs
meilleurs titres avec la facilité de ceux qui tournent comme des Stakanovistes.
Tout fonctionne, s’enchaîne à la perfection, la perf’ est huilé comme un corps
de bodybuilder, la pression monte encore d’un cran. Défilent Festen,
Ode à la mort et Porcelaine, qui résonnent Luke boosté aux hormones de croissance, de
celles qui transforment un baudet en pur-sang prêt à concourir au prix
d’Amérique. Faciles, solides, avec leur répertoire de dingue que vient d’étoffer
le presque parfait Treillères über alles, ils arrivent à égaler les
meilleures performance des Guerilla
Poubelle. Même volonté d’en découdre, d’envoyer du pâté, de réveiller
l’auditoire. Rome sonne décadence, et l’on veut tous croire que le spectacle du
capitalisme se terminera ce soir, bousculés par leur furia punk convaincante.
Plus politique que jamais, Justin(e) crache à la gueule du système sans
méchanceté. Anachroniques et totalement de leurs temps, indignés depuis plus de
cinq ans, ils sont le fer de lance de ce qui se pense de mieux sur la scène
actuelle, alternative comme jamais. Le temps d’un dernier hymne, Alex n’en peut
plus, fait signe que c’est fini et s’enfonce dans la salle en se tenant le
ventre. Les Combustibles peuvent relâcher un public à l’état liquide dans des
rues de Paris. Terrible.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire