Avec : Riz Ahmed, Arsher Ali, Nigel Lindsay
Année : 2010
We are 4 lions.
Omar, Hassan, Barry et Fessal sont les seuls membres d’une section djihadiste domiciliée dans la banlieue populaire de Londres. A cours d’idées pour se faire reconnaître, ils décident de préparer un attentat suicide spectaculaire qui installera leur organisation au premier plan. Mais ont-ils les épaules assez larges pour mettre en œuvre une opération aussi ambitieuse ?
Basé sur un scénario écrit par Sam Bain et Jesse Armstrong, deux auteurs qui ont travaillé pour Sacha Baron Cohen, We Are Four Lions est certainement le projet le plus gonflé qu’il nous ait été donné de voir ces dernières années. Voyez plutôt le numéro d’équilibriste : faire rire en traitant du terrorisme musulman sans pour autant stigmatiser une communauté bien souvent réduite à sa branche radicale. Grand écart qu’effectue avec la souplesse d’un Jean-Claude Van Damme version Full Contact le réalisateur Chris Morris. Mais avait-il seulement le choix ?
Car loin d’y aller avec la crotte au cul, le film pousse son sujet dans ses derniers retranchements, pour nous offrir un grosse tranche de rire assortie d’une réflexion sur les dérives du fondamentalisme djihadiste. Et pour se faire, il devait être incarné par un casting quatre étoiles, de celui qui ne fait pas douter un instant de la véracité de protagonistes aussi loufoques que pathétiques. Une réussite tant on se prend immédiatement d’affection pour ces pieds nickelés du terrorisme, qui s’humilient dans des camps d’entrainement au Pakistan, mangent leurs cartes SIM pour ne pas être géolocalisés, tournent des vidéos de revendications type bêtisier d’Al Qaïda, forment des corbeaux kamikazes ou communiquent avec des pingouins sur une plateforme de jeu pour enfants.
Extrêmement subtil, le film démonte avec brio toute la dialectique islamiste radicale. On y voit les ambitions personnelles prendre le pas sur le bien général tout en comprenant que les barbus les plus visibles ne sont pas forcément ceux qui passent à l’acte. Ridiculisé, le djihadisme apparaît comme vide de sens, les plans machiavéliques de nos Four Lions ne servant plus qu’une cause, la leur, quand ils ne passent pas des heures à débattre autour d’interprétations toute personnelle des textes, exégèses grotesques des desseins d’un Dieu que l’on imagine consterné par ces détournements sémantiques. L’ultime coup de génie du film se nichant dans la mise en scène de la famille d’Omar, dont tout laisse à penser qu’elle est aussi intégrée qu’équilibrée, mais qui est minée de l’intérieur par un fanatisme illuminé d’autant plus effrayant qu’il est totalement invisible.
En bref : We Are Four Lions, s’il aurait pu n’être qu’une pochade, une grosse farce au goût douteux utilisant l’argument islamiste pour faire le buzz, s’avère une des comédies les plus fine de ces dernières années. Traitant d’un sujet inabordable, elle se tire haut la main de tous les pièges tendus pour dérouler une histoire drôle et touchante qui arrive à faire rire (jaune) tant les fanatiques qu’elle met en scène sont sincères et humains. A force de Campings et de Ch’tis, on en avait oublié que le rire pouvait aussi éclairer des phénomènes de société complexes, plus intelligemment même que bien des journaux télé. Précieux.
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